Interview pour La Libre Belgique, paru le 9 mai 2023. Propos recueillis par Etienne Daman.
Clap de fin pour Georges-Louis Bouchez et les forces spéciales. La chaîne flamande VTM a diffusé lundi 8 mai le deuxième épisode de son émission de téléréalité Special Forces dans lequel un panel de personnalités célèbres participe à un entraînement militaire intensif dans le désert marocain. Lors du premier épisode, le président du MR, seul francophone de l’émission, n’a pas particulièrement brillé. Mais, critiqué par ses camarades pour son manque d’esprit d’équipe, chahuté dans les médias et sur les réseaux sociaux, il déclarait le lendemain matin sur LN24 : « Vous verrez dans le prochain épisode que je suis quelqu’un qui prend ses responsabilités”. Une mauvaise chute lors d’un exercice physique a eu raison de la recrue Bouchez. Après 20 minutes de spectacle, il a annoncé son départ, craignant que sa condition physique puisse sanctionner l’équipe.
C’était prévisible : la vidéo du vol plané a rapidement provoqué les quolibets de ses détracteurs sur Twitter. Les uns pointent du doigt son individualisme, également reproché dans le monde politique. Les autres parlent du peu d’efforts consentis par le candidat libéral.
« Le résultat est clairement négatif », affirme Nicolas Baygert, enseignant en communication politique à l’IHECS et à l’ULB. Il analyse : « Georges-Louis Bouchez n’a pas joué le jeu. Alors que l’émission demande aux candidats de se dépasser physiquement, de se mettre en danger, lui n’a pas accepté de se plier aux règles. Il est resté en représentation, enfermé dans les marqueurs de personnalité qu’on lui connaît déjà. Il est apparu comme quelqu’un qui ne sait pas recevoir d’ordres ». Au-delà des défaillances physiques, les problèmes de néerlandais ont également joué en sa défaveur puisque Georges-Louis Bouchez ne s’est exprimé qu’en français tout au long de l’émission.
Un exercice indispensable
Un rendez-vous manqué avec la télévision flamande donc. Si l’exercice est périlleux il est aussi devenu incontournable au Nord du pays. Le président de Vooruit, Conner Rousseau, dans The Masked Singer, la ministre fédérale Annelies Verlinden dans l’émission Viva la Feta, ou Bart De Wever dans De slimste mens ter wereld,.
On ne compte plus les politiques flamands qui se sont prêtés au jeu de la téléréalité. Un jeu plus sérieux qu’il n’y paraît et surtout indispensable pour exister médiatiquement auprès du public flamand. « Cela fait partie de l’imaginaire qui entoure les personnalités politiques en Flandre, explique Nicolas Baygert. Les politiques font partie des Bekende Vlamingen, un star-système à la flamande qui évolue en vase clos. Ils savent qu’il faut passer par l’entertainment pour attirer l’attention des relais d’opinion. Les dynamiques sont assez différentes dans l’espace médiatique en Belgique francophone qui se partage entre Bruxelles et Paris. »
Une distinction entre le Sud et le Nord du pays qui repose sur un élément : la dignité de la fonction publique. Le professeur Baygert confirme : « Les francophones se montrent beaucoup plus sceptiques face à ce genre de formats. Ils estiment que cela délégitime la fonction politique. Quand Thomas Dermine annonce participer à Pékin Express, c’est un poisson d’avril, alors qu’en Flandre cela paraît bien plus vraisemblable. Entre politique et entertainment, les politiques flamands ont dû apprendre à jongler. »
Votre commentaire