Entretien téléphonique pour 7sur7.be. publié le 3 avril 2019. Propos recueillis par Michaël Bouche.
Donc, l’explication officielle du PS qui consiste à dire qu’il ne veut pas s’enfermer dans un débat strictement communautaire, c’est plausible d’après vous?
Oui, parce qu’ériger la N-VA comme contre-modèle au PS, c’est revenir à un débat public sur les thèmes de prédilection de la N-VA, les questions migratoires et communautaires. Le PS n’en a pas envie. (…) Et puis en ce qui concerne le projet confédéral de la N-VA, il n’y a pas de contre-projet proposé du côté francophone. C’est là où le PS est embêté parce qu’il n’a pas assez de matière pour se démarquer et proposer une alternative au modèle confédéral de la N-VA. C’est plus porteur pour lui de dire: ‘Non, on préfère parler d’autre chose’
Est-ce que le PS ne risque pas d’offrir plus de visibilité à d’autres concurrents politiques, comme Ecolo et Groen, qui, eux, ont accepté de débattre avec la N-VA? (ndlr. Un duel entre Bart De Wever et Jean-Marc Nollet organisé par L’Echo/De Tijd aura lieu ce mercredi à 19h30).
Le problème, c’est que ces thèmes-là vont automatiquement mettre en avant d’autres acteurs politiques, comme Ecolo et Groen, qui apparaissent comme légitimes à s’approprier cette thématique. D’une part, il y a la volonté d’écarter la N-VA comme attracteur idéologique dominant du système. D’autre part, ça laisse la place à Ecolo pour occuper le terrain médiatique sur les thèmes du climat et de l’environnement. Ca ne va pas forcément favoriser le PS qui, bien qu’ayant une doctrine éco-socialiste, n’est pas le premier qui arrive à l’esprit de l’électeur sur ces questions spécifiques.
Tout de même, est-ce que le fait de refuser le débat avec la N-VA, ce n’est pas un peu légitimer son discours qui consiste à dire ‘Il y a deux démocraties complètement différentes dans ce pays’?
Au-delà des thèmes qui sont choisis, le risque majeur est de valider une sorte de divorce, d’avoir des forces et acteurs politiques qui ne se parlent plus. Après, il y a aussi une dimension artificielle dans toute cette mise en scène dans la mesure où l’électeur flamand ne peut pas voter pour ou contre le PS. Là où durant la campagne électorale de 2014, il y avait encore une volonté de dialogue entre communautés, ici il y a une sorte de divorce acté de la part du PS en disant: ‘On n’a même plus envie de débattre avec vous’.
Certains estiment que la véritable raison de ce refus, c’est une guerre d’ego au sein du PS entre Magnette et Di Rupo, qui n’auraient pas envie de se partager la vedette. Que cela vous inspire-t-il ?
Il s’agit ici plus d’une lutte interne. Ça peut jouer, oui, même si du côté de la N-VA, on peut imaginer que cette guerre d’ego a également lieu entre De Wever, Francken et Jambon. (…) C’est vrai qu’il y a aujourd’hui une différence de style évidente entre Magnette de Di Rupo. Magnette semble plus à l’aise avec l’exercice de l’improvisation, du temps réel et de la réponse dans un débat, alors que Di Rupo a plutôt tendance à être dans quelque chose de plus cadenassé et plus contrôlé. C’est le choix des armes. En tout cas, le fait qu’Elio Di Rupo soit le président du PS le rend légitime dans le rôle du débattant. C’est logique que le président de parti vienne débattre. On peut comprendre qu’il y ait des frictions en interne dans la mesure où c’est toujours Di Rupo qui est le président.
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